- Épisode 1 by Florent Lattaud de L'École du Recrutement
Hop hop hop ! Jean-Michel Talent signe son grand retour. Cette fois-ci il est allé à la rencontre de 7 expertes et experts de L'École du Recrutement. Pour cette sixième série, notre duo de choc ne passe pas par 4 chemins, on casse les idées préconçues et on reprend les bases.
Premier épisode : candidat n'est pas un métier avec Florent Lattaud. On y va ?
« Elle n’a pas su faire preuve de motivation »
« Sa manière de se présenter était brouillon »
« Il ne s’est même pas renseigné sur le poste avant »
Toutes ces phrases, vous les avez soit déjà dites, soit déjà entendues.
On veut que le candidat fasse preuve de motivation, sache se vendre, sache nous rassurer.
Qu’il nous explique son parcours professionnel dans le détail mais pas trop.
Qu’il ou elle se vende pour donner envie mais sans trop en faire.
Que la personne ait fait un travail préparatoire avant l’entretien pour prouver sa motivation.
En somme, on voudrait que les candidats soient des professionnels… de la candidature.
Qu’ils disposent de compétences à candidater.
Il n’y a qu’à voir le nombre de tutos, de coachings, d’articles qui expliquent comment être un bon candidat.
Il y a donc des méthodes à connaitre, des codes à avoir, on est attendus au tournant… et pourtant…
Candidat n’est pas un métier !
On devient candidat malgré nous. C’est un passage obligatoire que personne ne peut éviter.
Tout le monde y est confronté au moins une fois dans sa vie.
Mais vous connaissez une activité dont TOUT LE MONDE a les compétences ? Surtout que ce n’est pas une épreuve qu’on passe tous les jours.
Ce n’est pas parce que j’ai fait du pain une fois dans ma vie à l’aide d’une recette Marmiton que j’ai développé des compétences de boulanger. Et encore moins que je fais du bon pain. Mais après tout, je ne prétends pas faire ce métier.
Un candidat ne prétend pas être candidat professionnel.
Partant de ce principe, exiger des talents qu’ils aient une maitrise de cet exercice, est discriminatoire.
Il y a celles et ceux qui ont appris, lors de leurs études, à passer ce type d’épreuve.
Il y a celles et ceux qui sont naturellement plus à l’aise pour se vendre.
Il y a celles et ceux qui vont facilement capter ce que vous attendez d’eux.
Mais pour les autres ? Ils et elles seraient destinés à ne pas travailler pour la seule raison qu’ils n’ont pas les codes de l’entretien ? Ou qu’ils ne sont pas à l’aise avec cet exercice ?
Et vous ? Est-ce que vous ne passez pas à côté de la bonne personne en vous focalisant sur de mauvais critères ?
Il faut faire la distinction entre un bon candidat et un bon professionnel
La nuance est essentielle. Que ce soit pour apporter plus de justice dans vos recrutements mais également pour mieux recruter.
Une bonne candidate peut être une mauvaise professionnelle.
Un mauvais candidat peut être un bon professionnel.
Ok, ça mérite de se pencher un peu plus là-dessus.
Le bon candidat est la personne qui va vous donner envie de travailler avec elle par son discours, sa sympathie, son aura, la démonstrationde sa motivation.
Le bon professionnel est la personne qui sera performante sur le poste à pourvoir.
Recruter le bon talent, c'est donc vous laisser guider par vos biais, au risque de ne pas retenir la personne la plus performante, mais celle qui vous aura donné la meilleure impression.
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on a souvent peur d’évaluer des commerciaux. Forcément, des pros de la vente, on se dit qu’ils savent faire, qu’ils savent biaiser notre jugement. On a donc bien conscience qu’évaluer un bon candidat n’est pas une bonne chose. Alors pourquoi on continue dans cette voie ?
Tout simplement parce qu’on a appris comme ça, sans méthode scientifique, à juger plus qu’à évaluer. On ne sait pas faire autrement.
Sauf que notre rôle, c'est justement d’évaluer des éléments qui pourront prédire de la réussite de la personne une fois en poste.
Maintenant qu’on a dit ça, comment on fait ?
L’importance des critères
Je ne vais pas ici vous donner la méthode d’un bon brief qui sera abordée dans un prochain article. Teasing de fou… Encore un peu de patience.
Mais il existe un moyen simple de savoir si ce que vous êtes en train d’évaluer est pertinent. Demandez-vous si c’est en lien direct avec le poste.
Si la réponse est non, vous êtes dans le jugement et vous ne devez pas en tenir compte.
Voici une liste (non exhaustive) de critères qui vont favoriser les bons candidats et qui n’ont aucune valeur prédictive sur les compétences une fois en poste :
L’aisance ou le stress durant l’entretien
L’entretien est une douleur pour beaucoup de personnes. C’est un exercice tout sauf naturel. Ce n’est pas parce qu’une personne apparait stressée qu’il faut en déduire qu’elle dispose d’une mauvaise résistance au stress. C’est relatif au contexte.
La manière de présenter son parcours professionnel et la capacité à se vendre
« Elle n’est pas assez synthétique », « il n’en dit pas assez ». Difficile de savoir en tant que candidat ce qui est attendu par la personne qui recrute, surtout face à une « question » aussi évasive que « parlez-moi de vous ». Un commercial est formé au pitch de vente qu’il doit tenir face à un client, c’est son métier. Ce n’est pas le cas d’un candidat.
La tenue vestimentaire
La tenue vestimentaire est intimement liée à la culture de l’entreprise. Si je viens en costume cravate chez LEDR, on va me regarder de travers, en revanche dans une banque, c'est un impératif. Un candidat n’a pas à savoir à l’avance quelle est la tenue vestimentaire souhaitée.
La motivation
Vaste sujet ! Mais retenez une phrase : la motivation est la fortune des salles de sport. La motivation est fluctuante, relative à un contexte. Ce n’est pas parce qu’une personne paraît motivée en entretien qu’elle le restera et inversement. La motivation se provoque, elle s’entretient, elle ne naît pas à partir de rien.
La présentation du CV
Demain, si je dois faire un CV, je paierai un service pour le faire à ma place. Parce que j’en ai la possibilité. Il sera beau, bien présenté, conforme au standard attendu sans grand effort de ma part. Et ça ne révélera pas non plus de compétences informatiques particulières. Le CV est un outil très codifié. Tout le monde ne détient pas ces codes. Ce n’est pas une faute. D’autant plus que les codes en questions restent discutables (photos, adresse, date de naissance, loisirs…).
Souvenez-vous d’une chose : tous les escrocs connaissant les codes. Ce qui ne veut évidemment pas dire que toutes les personnes qui les détiennent sont des escrocs.
Mais du coup, autant ne pas en tenir compte.
C’est vous le ou la pro du recrutement, pas le candidat.
C’est à vous de présenter les éléments du poste de manière suffisamment claire, objective et séduisante pour que la personne puisse se projeter.
Je ne dis pas que tout ça est facile.
On est programmé pour porter un jugement sur une personne de manière hâtive. C’est un instinct de protection. Notre cerveau va donc s’attacher à quelques détails. Des études ont même démontré que la forme du visage d’une personne va avoir un impact sur notre jugement.
Donc se défaire de ses biais est particulièrement difficile, même impossible en l’état.
C’est pour cette raison qu’il est nécessaire d’appliquer des méthodes pour ne s’attacher qu’à des critères objectifs, en lien direct avec le poste.
Écarter tous les critères qui vous font penser qu’un candidat est « un bon candidat » est une première étape.
Prendre conscience que candidat n’est pas un métier est le début de la désintoxication.
Cet épisode vous a plu ? C’était le tout premier de cette série ! Rendez-vous le 17 octobre avec Thomas Dutrieux pour parler outils et recrutement. En attendant, vous pouvez me retrouver sur LinkedIn.